
Il revient en particulier sur son écriture et sur ce qu’elle a exigé d’un certain rapport au temps quand il s‘est agi d'écrire sur la guerre et sa guerre. Les bombardements de Dresde sont qualifiés ici de « destruction dépourvue de sens, absolument inutile », ce qui apparaissait bien déjà dans la fiction d' Abattoir 5. Pourtant ici, il s'exprime depuis un autre temps encore que ceux de l’écriture du trauma. Son discours est troué de remarques cinglantes mais semble avoir trouvé une certaine fluidité. Plus besoin de faire vivre au lecteur la fragmentation du temps dans l'écriture elle-même. Il lui parle simplement.
Kurt Vonnegut rappelle en particulier les remarques de Mary O’Hare, femme de son compagnon de guerre et de captivité, à qui il avait rendu visite après la guerre en espérant trouver avec lui l’inspiration pour écrire son livre sur Dresde. Avec le temps, ces remarques ont fait leur chemin en lui: en effet Mary O'Hare déclarait alors, dans sa colère, qu’ils étaient tous des gamins pendant la guerre, son mari, lui, Kurt Vonnegut, et tous les combattants. D’où le sous-titre donné plus tard au livre pour la publication d’Abattoir 5: La croisade des enfants, en référence aux croisades du Moyen-âge. Rien à voir avec la propagande et tous les films faisant d’eux des héros hollywoodiens...

Vonnegut se dit « sidéré d’être devenu écrivain : « Je ne pense pas que je puisse contrôler ma vie ou mon écriture… Je deviens, tout simplement. » Et sa phrase radicale « Il n’y a jamais que le temps » vient résumer en quelque sorte ce qu‘a été cette expérience de guerre et d‘écriture pour lui. D’où la place donnée à la femme de Loth au début d’ Abattoir 5.
Les exigences du regard en arrière sont si dures qu’il faut s’y reprendre à plusieurs fois, braver les vents contraires et les silences, les siens et ceux des autres. L’audace de cette transgression, de cette exigence, celle-là même dont nous parlent, avec la femme de Loth, Anna Akhmatova et les autres, poètes, romanciers et artistes, impose le respect. Oui, ce respect qui se lit dans l’étymologie latine du mot: « respectus », respect, regard en arrière... (ainsi que me l’a indiqué une participante du séminaire).
Nous devons y revenir comme y reviennent tous ceux qui ne peuvent pas ne pas inscrire leur expérience traumatique dans une œuvre. Chaque créateur invoquant la femme de Loth nous invite à la regarder, à nous retourner sur elle, à lui manifester notre respect. Elle ne peut plus se retourner, elle, mais nous sommes conviés, convoqués peut-être, à le faire à sa place, sur elle et finalement sur nous-mêmes. Un mouvement d'immobilisation entre interdit, transgression et respect, voilà ce que la femme de Loth maintient immuablement à travers le temps. (Cf aussi les articles du blog, entre autres: "La femme de Loth en guerre" et "Loth et sa femme de sel").
Les exigences du regard en arrière sont si dures qu’il faut s’y reprendre à plusieurs fois, braver les vents contraires et les silences, les siens et ceux des autres. L’audace de cette transgression, de cette exigence, celle-là même dont nous parlent, avec la femme de Loth, Anna Akhmatova et les autres, poètes, romanciers et artistes, impose le respect. Oui, ce respect qui se lit dans l’étymologie latine du mot: « respectus », respect, regard en arrière... (ainsi que me l’a indiqué une participante du séminaire).
Nous devons y revenir comme y reviennent tous ceux qui ne peuvent pas ne pas inscrire leur expérience traumatique dans une œuvre. Chaque créateur invoquant la femme de Loth nous invite à la regarder, à nous retourner sur elle, à lui manifester notre respect. Elle ne peut plus se retourner, elle, mais nous sommes conviés, convoqués peut-être, à le faire à sa place, sur elle et finalement sur nous-mêmes. Un mouvement d'immobilisation entre interdit, transgression et respect, voilà ce que la femme de Loth maintient immuablement à travers le temps. (Cf aussi les articles du blog, entre autres: "La femme de Loth en guerre" et "Loth et sa femme de sel").
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