jeudi 2 mars 2017

Possibles futurs, encore

Ces jours-ci, dans le métro parisien, je rencontre à plusieurs reprises une citation d'un poème de Guillevic:
"le matin ne parait pas devoir déboucher sur midi Il promet autre chose",
extrait du recueil intitulé "Possibles futurs" (cf mon article du 10/11/2015).


Quelle promesse magnifique faite de réceptivité à ce qui peut advenir, fêtant presque l''inconnu! Pas tout à fait cependant car toute en retenue, cette promesse, plutôt en veilleuse. Cet inconnu pourrait être inquiétant mais le poète nous propose de nous risquer à l'attendre avec lui. Il nous invite à nous poser en sentinelle à l'orée du chemin que la poésie ouvre pour accueillir le possible futur.


Cette phrase relue dans la moiteur du métro chargé des effluves de nos nuits avec ou sans sommeil, avec ou sans lit, avec ou sans amour, hébergeant les horizons de nos jours, avec ou sans soleil, avec ou sans angoisse, avec ou sans surprises, parfois avec faim, mais sans toit, dessine un seuil à franchir en " veillance" .


http://www.editions-eres.com/uploads/img300dpi/201511195510Sud-nord26.jpgCe terme est façonné par Jean Oury dans un documentaire qui lui est consacré, "Le sous-bois  des insensés" (2015), réalisé par Martine Deyres . On peut se le procurer avec le numéro de la revue "La psychothérapie institutionnelle" paru chez Erès. Cette veillance dont il nous parle a résonné poétiquement pour moi qui venais juste de réentendre les échos de Guillevic sur un pan de cloison métropolitaine.


Du psychiatre au poète ces voix disent la gravité de l'inconnu avec une infinie délicatesse, un infini respect dont témoigne aussi la réalisatrice du film. Elles disent aussi bien l'exigence de la disponibilité; mot phare aussi dès l'ouverture de ce film documentaire.


Pour travailler avec les schizophrènes à la fameuse clinique de La Borde, Jean Oury, héritier parmi d'autres du grand pionnier François Tosquelles, ciselait les mots pour les entendre et nous les faire entendre. Au fond de notre humanité parfois désolée ou ravagée, le chuchotement de la langue poétique est la plus belle fenêtre qui peut s'ouvrir à nous tous!

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