mercredi 4 décembre 2013

Cheminements psychiques avec la guerre d'Algérie


Dans Rue Freud, la Méditerranée est bien présente, même si le point de départ du livre se situe à Paris. Une partie du texte s'est écrite à Sète d'où je voyais les paquebots partir de l'autre côté de la mer. Et j'y ai vu aussi sur le port les plaques commémoratives des départs de bateaux de réfugiés des guerres successives ... 

Depuis ce port méditerranéen, j'ai travaillé sur la place de la guerre d'Algérie dans mon expérience psychanalytique. Cette guerre traverse de multiples psychanalyses. Dans mon cabinet, j'en réentends les échos à travers la parole de personnes de différentes générations, ayant directement vécu cette guerre ou l'ayant reçue en héritage.

Je n'ai pas eu jusqu'à présent à accueillir de personnes ayant "fait" cette guerre, comme on dit. Mais j'ai accueilli des enfants "d'appelés" et de militaires l'ayant "faite", des enfants de "pieds noirs" ayant dû quitter l'Algérie, des enfants d'Algériens venus s'installer en France eux aussi à la fin de cette guerre.

J'accueille également de jeunes étudiants algériens de passage en France aujourd'hui pour approfondir leurs études, n'étant pas nés pendant la guerre d'indépendance mais enfants pendant la décennie 90 qu'on appelle "les années noires". Et encore  d'autres algériens d'origine, ayant choisi de vivre en France ou simplement venus pour leurs études mais restés depuis et ayant acquis la double nationalité. 

Ces analysants se disent souvent marqués par une forme de division, de double identité culturelle, et peuvent douter parfois de leur choix de rester en France ou de retourner en Algérie. Il arrive que la décision de faire une psychanalyse entre peu à peu en contradiction avec leur éducation religieuse. Ces chemins de l'analyse s'avèrent ainsi aussi déstabilisants que la guerre elle-même pour ceux qui y ont été directement confrontés.


Si la guerre d'Algérie prend place dans Rue Freud, c'est parce que je tente d'y écrire comment mon propre rapport à cette guerre peut nourrir ma pensée de psychanalyste avec ces analysants et entrer dans la dynamique du transfert. Expérience délicate qui amène l'analyste à un certain dévoilement de sa pratique étayée sur une histoire personnelle, pour éviter de discourir sur l'autre comme le ferait un médecin parlant de son patient. Cette expérience vise à trouver dans l'écriture une autre position que celle d'un surplomb, peu cohérente à mon sens avec la démarche d'un psychanalyste.

Mes pérégrinations à partir de la rue Sigmund Freud à Paris m'ont ainsi emmenée sur le port de Sète mais aussi sur le pont St Michel à Paris où l'on peut lire sur la plaque commémorative l'évocation de la manifestation d'Octobre 1961 (photo ci-dessus) ainsi qu'à la station de métro Charonne, où a été posée celle qui commémore la manifestation de Février 1962. 
 




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