dimanche 12 octobre 2014

Chercher en marchant...L'Algérie, toujours...



Une émotion ce matin-là en écoutant la radio ("La fabrique de l'histoire" sur France culture le 29/09/2014). Une historienne, Malika Rahal, est interrogée sur sa démarche de chercheuse. Travaillant sur la politique et la violence en Algérie depuis la seconde guerre mondiale, elle remarque combien il est difficile de faire cette histoire après l'indépendance car celle des historiens s'arrête là. Elle explore en particulier la région du parc national de Djurdjura.


image du blog de Malika Rahal "textures du temps"
Il se trouve que fin Septembre, l'actualité a remis à nouveau cette région au-devant de la scène: c'est à proximité en effet qu'a été assassiné  Hervé Gourdel, au dessus de la forêt des Aït Ouavane, "lieu d’une étrange compétition entre le tourisme et la violence depuis les années 1930", écrit-elle sur son blog, "Textures du temps". Voir aussi son article dans le journal Le Monde daté du 2 Octobre à la page "décryptage".


Cette forêt en effet a connu une alternance de situations politiques et sociales diverses: pendant la colonisation, comme lieu d'expropriation, puis comme lieu de guerillas, d'insurrections et de contre-insurrections. Des randonnées y furent ensuite organisées dans un mouvement de développement touristique de la région. C'est ainsi que Malika Rahal a voulu s'y rendre à son tour en 2011.


Elle est allée y interroger des témoins de ces transformations, en se servant de l'histoire de cette forêt pour ménager leurs difficultés à parler directement des évènements qui s'y sont déroulés à cause des douleurs ou des peurs encore présentes aujourd'hui chez certains. Elle dit aussi vouloir "faire de l'histoire avec les pieds". D'autant plus que les cartes géographiques de la région sont difficiles à trouver, objets stratégiques pendant les années noires. Elle raconte ainsi la forêt chargée de traces de l'histoire "présentes à chaque instant sous les pieds".


J'ai retrouvé dans cette démarche une attitude commune à la mienne et à celle d'autres chercheurs: elle semble même dessiner une sorte de communauté de chercheurs-marcheurs. J'ai à l'esprit de nombreux exemples, en particulier un livre lu récemment, au beau titre: Les trottoirs de la liberté, de Gérard Sainsaulieu, paru en 2011 chez L'Harmattan. Il nous raconte l'histoire politique de Paris à partir des traces et inscriptions multiples qu'un oeil attentif peut découvrir en marchant dans les rues parisiennes et qu'il nous déchiffre. Je pense aussi à ce sous-titre évocateur du livre plus récent d'Antoine de Baeque, Essai d'histoire marchée.


Mon livre Rue Freud et ce blog, avec les nombreuses références à des plaques commémoratives, des noms de rues et de lieux  publics,  et des allers et retours géographiques et psychiques, témoignent aussi de l'importance de la marche et du regard qu'elle implique sur des lieux éprouvés par les pieds. Et pourtant il s'agit d'une recherche psychanalytique dont le point de départ se base dans le cadre restreint et clos d'un cabinet d'analyste...



 

 


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