jeudi 9 janvier 2014

Gilgamesh, un héros pour l'approche des fins de vie aujourd'hui?

L'épopée mésopotamienne de Gilgamesh, datant du troisième millénaire avant Jesus-Christ, est de plus en plus connue du grand public après avoir été longtemps méconnue au profit d'autres héros des civilisations anciennes, égyptienne et gréco-romaine notamment. Elle est même devenue, au cours de ces dernières années, l'objet d'une mode avec, entre autres, la publication de nombreuses éditions pour enfants. C'est ainsi que l'épopée initiale se trouve quelque peu transformée faisant de Gilgamesh un héros immortel, ce qu'elle ne dit pas à l'origine. J'en donne ici deux exemples recueillis dans la presse et les programmes de télévision.
 


Annonce d'un programme de la chaine
Arte diffusé le 8 Septembre 2007 
C'est pourtant dans le cadre d'un groupe de réflexion sur la mort et les soins palliatifs,  intitulé "Fonction soignante et accompagnement", que j'en ai présenté mes premières approches. Je ne souhaite pas faire de Gilgamesh une figure de proue des références culturelles concernant les soins palliatifs. De même que ma démarche d'écriture, dont je m'explique au début de mon livre, ne se veut pas exclusivement nourrie par l'expérience ou la théorie psychanalytique, ni adressée exclusivement à des psychanalystes. Il s'agit pour moi d'éviter les pièges d'une supposée spécialisation, qu'elle soit en soins palliatifs, en écriture psychanalytique,  en contes ou en mythologie... Et de permettre l'ouverture de voies de traverse pour la réflexion, sans craindre d'aborder des domaines qui par ailleurs font l'objet de spécialisations.  
 
 
L'épopée de Gilgamesh est pourtant riche de thèmes fondamentaux pour la réflexion des équipes soignantes et des accompagnants bénévoles en soins palliatifs ainsi que pour l'entourage des personnes en fin de vie ou récemment décédées. Pour l'affirmer, je m'appuie sur mon expérience d'animation de groupes de parole et de supervision d'équipes de soins palliatifs, en unités fixes ou mobiles hospitalières. Il s'avère en effet que la possibilité d'aborder les questions concernant la mort par d'autres voies que celles directement présentes dans une perspective soignante et d'accompagnement  est précieuse. L'art, la littérature, toutes les œuvres de la culture mais aussi les métiers liés à la mort autrement que par le soin ont beaucoup à nous apporter. 


C'est ainsi que j'ai rencontré dans l'épopée de Gilgamesh bien des éléments de réflexion : sur la difficulté d'admettre notre condition de mortel, sur notre arrogance potentielle d'êtres humains par rapport à notre vulnérabilité, sur l'accompagnement en fin de vie, qui malgré sa nécessité ne met pourtant pas fin à l'angoisse.  
                
 J'y ai appris aussi sur le deuil, les rites de deuil, les limites de la psyché face à ce qui la dépasse et sa capacité à pousser jusqu'aux limites la destructivité humaine. 
Le héros Gilgamesh m'est apparu exemplaire de la façon dont nous pouvons nous leurrer sur des questions qui touchent à nos limites, à notre non savoir et à notre mortalité. Et pourtant Gilgamesh apparaît désormais ainsi, dans des titres comme celui que j'ai repris du journal  Le Monde daté du 14 Aout 2007, comportant un dossier spécial sur cette épopée: "Gilgamesh L'immortel".

(Les chapitres XV, XVI et XVII de mon livre développent ces questions.) 

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